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Les ourses rouges de la Berlinale

mercredi 9 février 2011, par Yuri

Pas beaucoup d’ourses rouges pour la soixante-et-unième édition de la Berlinale 2011, l’un des trois festivals de cinéma les plus importants de l’univers, qui débute ce jeudi, à Berlin évidemment. Mini selection dans la selection des films et documentaires à sujet/thématique/influences queer.


La programmation de cette nouvelle édition 2011 de la Berlinale est en ligne depuis peu. La légende veut que le programme de ce festival soit figé le jour même ou le catalogue doit être envoyé à l’imprimerie. Ce qui veut dire environ 10 jours avant le début du festival. Voilà pour le coté stressant de cet événement.

Pour le reste, la Berlinale est très agréable. Comme presque tout ce qui se passe à Berlin. On peut acheter ses places sur internet. Si on est flemmard de la carte bancaire on peut se rendre au cinéma le matin même de la projection qui vous intéresse et trouver des places de la dernière minute. De manière générale, je pense que il est extrêmement difficile d’être exclu d’une projection. Par contre, être exclu de la programmation, ça c’est super facile, mais on en parlera après. Anyway, jamais vu de queue à l’entrée. Oui ! il y a beaucoup de monde à Postammer Platz pour des projections très spécifiques. Mais d’habitude on y arrive sans problèmes.

Puis il y a le coté queer de la Berlinale. Surtout avec la sélection du "Panorama", le deuxième programme le plus important, après la compétition officielle. La section Panorama a, en effet, depuis très longtemps été infiltré par un nombre important de personnes de genre queer, (surtout de gays, il faut reconnaitre), ce qui nous permet parfois de trouver des films qui nous touchent un peu plus que les films indépendants classiques qu’on peut voir à Locarno par exemple.

Disons qu’à Berlin, il y a donc le choix entre les histoires de mecs, gay ou pas mais en tout cas avec beaucoup de poils (et parfois épilées s’il s’agit de drag queens et/ou de jeunes garçons prostituées) ou sinon les films très esthétiques sur la femme d’un pécheur norvégien dont l’activité économique est ruiné par les changements climatiques. Pour les lesbiennes, comme vous l’aurez bien compris, mes petits lapins, ou mieux, mes petits nounours fluo dykes, il faudra repasser la prochaine édition !

Non, j’exagère évidemment ! C’est fou, les filles se plaignent toujours ! En plus, des lesbiennes qui font des films, on le sait bien, il y en a très peu. Et puis, si quand même il y en avait, elles ne seraient pas vraiment à la hauteur...disons presque, mais pas tout à fait ! Parce que on est dans un milieu pointu, pas dans vos boums ou soirées ringardes. Le cinéma est un environnement très concurrentiel, il faut s’y mettre avec plus de professionnalisme ! Allez les filles ! Circulez !

Bref, au lieu d’évoquer mes frustrations personnelles (et celles de quelques copines !) voilà mes conseils pour l’édition de cette année. Parce que de films de lesbiennes il y en a (deux !) et que il y a même un documentaire 100% girls. Bref, suivez mon regard, sans croiser les yeux.

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Documentaires

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homo@lv by Kaspars Goba, l’aventure (ou peut être le cauchemar) de l’organisation de la première gaypride à Riga en 2005 (pour ceux comme moi qui ont du mal à situer précisément Riga, c’est une ville de la Lettonie). Documentaire surement intéressant, voir glaçant.

 !Women Art Revolution - A Secret History by Lynn Hershman Leeson, là ça devient presque une question personnelle. On a vraiment aimé les deux derniers films de Lynn, Conceiving Ada et Teknolust (avec pas moins que Tilda Swinton qui jouait tous les rôles). Ce documentaire retrace l’histoire des femmes et de l’art contemporaine, vue à partir de... son salon !

House Of Shame / Chantal All Night Long by Johanna Jackie Baier, histoire d’une soirée queer trans berlinoise et de son ’organisateurice’ Chantal.

Die Jungs vom Bahnhof Zoo (Rent Boys) by Rosa von Praunheim, de son vrai nom Holger Bernhard Bruno Mischwitzky est, à lui tout seul, une institution cinématographique en Allemagne. Il a réalisé énormément de film de garçons gay, chic et camp. Ce documentaire suit la vie de quelques sex workers (les Rent Boys du titre) Roms à Berlin.

The Advocate For Fagdom by Angélique Bosio. La réalisatrice est française et s’était distingué pour son autre docu sur le mouvement No Wave ("Llik Your Idols"). Elle revient ici avec un film sur BruceLaBruce, réalisateur gay lui, et ses inspirations à rechercher chez Kenneth Anger, John Waters et Gus Van Sant. Dommage que la pauvre Angélique ici encore trouve le temps de faire un film qui pourrait être intéressant, qu’elle réalise surement très bien mais dans lequel elle interviewe pratiquement que des boys. Vraiment dommage !

The Black Power Mixtape 1967-1975 by Göran Hugo Olsson, qui réalise un docu sur le Black Power movement, Angela Davis (yuppiiii), la question raciale dans les années de plomb, avec un slogan qu’on adore : “You’re either part of the solution or part of the problem.” (soit vous faites partie de la solution, soit du problème).

We Were Here by David Weissman

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Zai Yi Qi by Zhao Liang, deux films qui parlent de SIDA et de son impact pour le premier dans la communauté gay de San Francisco lors de l’apparition des premiers cas de maladie. Pour le deuxième, Zai Yi Qi, sur la Chine de nos jours.

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Roulement de tambours, on passe à la fiction...

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Tomboy by Céline Sciamma. Oueeeeee ! Céline, Céline, Céline ! On a vu avec plaisir son premier film, La naissance des pieuvres. Perso, j’avais bien accroché certaines scènes. Puis je m’étais un peu égaré, j’avais perdu en concentration en suivant les bulles sentimentales de ces deux/trois (la troisième, la fofolle, je l’avoue, est ma préféré !) ados mignonnes parfois même un peu trop parfaites. Ce nouveau long-metrage, Tomboy, nous ramène encore plus en arrière. C’est l’histoire d’une gamine, Laure, qui a une tête (dans le sens d’un visage mais aussi du cerveau) et un corps (elle n’a que 10 ans !) de garçon. Sa famille s’installe dans une nouvelle ville, elle doit se refaire des nouveaux amis, alors elle pusse sa fantaisie jusqu’au but et, au lieu de se cacher, elle s’expose et laisse croire qu’elle est un boy. J’ai entendu et vécu tellement de fois cette histoire qu’elle me fait presque peur. Je me souviens de cette copine qui me racontait qu’à 8 ans elle voulait séduire une monitrice de sport au camping et se promenait avec une boulette de PQ dans son slip de bain. Le problème auquel elle n’avait pas songé était que dans la piscine, le PQ, devenu tout mou, s’échappait petit à petit de son maillot en laissant derrière elle une ligne intermittente blanchâtre. Bref, Céline, tu l’aura compris, malheureusement l’histoire que tu as choisi nous parle de manière très, très directe. Donc désolée, tu portes désormais tous nous espoirs. D’ailleurs, tout en étant psychorigide de la carte bancaire, je vais acheter mes places pour la projection sur internet à l’avance, pas de risque de rester dehors.

Chang-Pi-Hae (Ashamed) by Kim Soo-hyun le synopsis sur le site à l’air un peu compliqué mais c’est normal, le film est coréen. Trois filles qui se retrouvent par hasard et qui parlent d’amour. D’amour et de désir entre filles. Décrit comme cela, ça pourrait être super bien mais également très décevant. Il faut aller voir.

Romeos by Sabine Bernardi ; Lukas est intersexe. Il vit comme un garçon grâce aux hormones qu’il prend. Mais son genre n’est pas toujours clair. Il part pour l’université et il tombe amoureux du beau gosse de l’école. L’histoire promet. C’est un film allemand donc on aime, c’est certain.

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before, after

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Comme d’habitude si entre deux projections vous voulez sortir boire un verre, il n’y a que l’embarras du choix. A noter que depuis peu, un nouveau bar a ouvert, le Südblock à Kottbusser Tor. Il s’agit de la succursale de l’un de nos spots lgbt préférés, le Moebel-olfe. Pour le reconnaitre sur la place pas de stress, laissez vous guider par l’enseigne géante un cerf et un dromadaire en talons aiguilles qui s’embrassent.

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PS : J’allais presque oublier que la chef du jury de cette année, l’ourse la plus rouge de tous, est Isabella Rossellini.

3 messages
  • Merci pour la promo et le soutien mais la "pauvre" Angélique n’interviewe pas que des hommes. Il se trouve qu’elle interviewe des personnes intéressantes qui ont des choses à dire (du moins elle le croit) et parfois certaines (mâles et/ou femelles) disparaissent au montage. Je ne crois pas au quota hommes / femmes mais à l’intérêt de ce qui est dit dans le montage final. Je crois à ce que je fais, et je le fais pour que mon film soit intéressant et "lisible". Je ne suis pas féministe si cela signifie que je sois obligée de privilégier la parole d’êtres humains du même sexe que moi. J’espère que le néo-néo-féminisme signifie que l’on ira au-delà de ça. Et bien sûr, avant de comptabiliser les sexes masculins, regardez le documentaire, il y a sans doute une réponse à ce type de commentaires...

    La "riche (en espoir)" Angélique Bosio

    • Merci Angélique pour ta réaction. J’avoue avoir fait ce post pour qu’il y ait un mini débat sur notre place dans le milieu du cinéma. Tu dois t’en douter FFF est un site de lesbiennes. On est super contentes quand on trouve des réal, filles, qu’on aime bien. On est encore plus contentes quand elles parlent de choses qui nous touchent (de la culture de filles !). C’est sectaire, oui, mais c’est notre parti pris et on ne s’en cache pas !

      Je comprends ton argumentaire : quotas ou pas, intérêt global, personnes au delà des genres, universalisme... je le comprends, mais je ne le partage pas.

      J’ai écrit avant la Berlinale, sans avoir vu aucun film. J’ai donc spéculé à partir des résumés. Désolée de n’avoir pas réussi exprimer mon admiration pour la manière dont tu réalise tes documentaires mais seulement ma déception qu’ils ne parlent pas plus de femmes. La liste des films de l’article est en effet à lire comme une liste des choses que je pense ça vaut le coup d’aller voir, non pas comme une attaque. J’espère ça soit plus clair maintenant.