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JE MEURS D’AMOUR POUR TOI

vendredi 4 octobre 2013, par Sophie

Courts extraits des Lettres à l’archiduchesse Marie-Christine par Isabelle de Bourbon-Parme. Elles datent de 1760 et viennent d’être rééditées...


Entre juillet 1760 et novembre 1763, Isabelle écrit beaucoup à Marie-Christine. Après un naufrage et un incendie, plusieurs déménagements, et un classement hasardeux, il reste , tout de même, 194 lettres. 3 ans et 5 mois d’un amour torride. En réponse, une seule lettre a été conservée.

Lettre 7

"Octobre novembre 1760

L’humeur est une qualité fort à la mode, mais surtout dans l’Auguste famille dans laquelle j’ai le bonheur d’entrer, et dont vous faites le plus bel ornement. C’est sans flatterie que j’avance cette proposition, elle paraitra peut-être scabreuse et l’on m’objectera que l’esprit de ma sœur Marie-Anne et la beauté de ma sœur Elisabeth surpassent et vos agréments et votre physionomie, mais si l’humeur est une qualité digne d’être admise parmi le sexe, personne n’a un tel avantage au point que vous l’avez. Qui n’en a fait l’heureuse expérience ? Qui peut en douter ? Il ne reste qu’à savoir si cela peut passer pour une qualité avantageuse. la seule preuve à me donner et qui est suffisante, c’est qu’elle est générale. Or lorsque tout le monde a tort, tout le monde a raison, et s’il est vrai que les gens de mérite sont le plus petit nombre, il est aussi vrai qu’ils se conforment à l’usage et trouvent un défaut de mérite que de ne s’y pas conformer. C’est donc comme à la plus adorable de toutes les créatures, et non seulement dite adorable mais regardée comme telle d’après les preuves les plus évidentes, que je m’adresse pour implorer vos bontés. Epargnez de grâce mon pauvre cœur, l’amour, ce dieu cruel, me persécute : c’est de vous qu’il se sert pour se venger de moi, qui l’ai si souvent bravé. N’employez donc pas toutes vos armes si vous ne voulez me voir expirer de plaisir à vos pieds : jouez mal vos concerts. Si le clavecin me fut antipathique, il m’est devenu trop cher depuis que je vous ai entendue et il pourrait me donner la mort. Il est vrai qu’elle serait bien douce, mais n’étant plus, je ne pourrais vous aimer. Laissez-moi donc vivre pour vous adorer éternellement.

Voilà des vers en prose magnifiques. Ne devant parler ni du passé, ni du présent , ni du futur, je n’ai pu écrire autre chose, quoique mon amitié soit passé, présent, futur."

...

Lettre 15

"Décembre 1760

Je suis au désespoir de devoir vous dire avec toute la douceur possible que vous êtes de toutes les créatures la plus insupportable avec vos animaux de friseurs. mais en revanche, aussi, ferais-je de mon mieux pour y mettre ordre, et j’espère qu’à l’avenir vous ne serez coiffée et frisée (que) par des gens qui le jour et la nuit seront à vos ordres et ne dépendront que de vous. Vous savez que je tiens parole, ainsi vous y pouvez compter. Pour ce qui est des heures de votre toilette, je vous prie d’apprendre à vous lever d’une heure plus tôt quand vous avez autre chose à espérer plus tard. Je vous demande au reste pardon de ma sincérité ; vous savez que c’est mon mal et je vous assure que jamais réflexions n’ont été plus philosophiques et plus véridiques que celles-ci, que personne n’aime que soi, et que le reste est suivant la commodité. Voilà ce dont je serais incapable. Mais enfin, il faut s’attendre à tout dans la vie et regarder tout d’un œil indifférent. C’est ce que je ne puis. Adieu, je vais me coucher. Je vous souhaite beaucoup de plaisir toute la journée, ne comptant plus vous voir, car il n’est plus temps que vous veniez après votre toilette. Je n’aurais eu que cette demi-heure. Je vous embrasse pourtant malgré vos cruautés."

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Lettre 36

"Février 1761

J’étais venue chez vous chère Sœur, avec grande précipitation pour profiter d’un moment que nous aurions peut-être eu. Mais pas assez cruelle de me refuser de vos cheveux, vous voulez encore m’accabler en ne vous laissant pas voir par ceux qui vous adorent. Adieu, quelqu’inhumaine que vous soyez, il faut pourtant vous aimer."

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Lettre 42

"Février-mars 1761

Bonjour adorable Soeur, comment vous portez-vous ? Je ne puis attendre de vos nouvelles, j’espère que vous aurez bien dormi, sans cela je ne crois plus à vos promesses. je voudrais bien pouvoir vous exprimer combien je vous aime car il me semble que depuis la preuve que vous donnez de la façon de penser la plus rare dans le monde, je vous aime deux fois autant. Je suis toujours prête à pleurer quand j’y pense. Soyez seulement tranquille et oubliez tout, ne vous occupez que de mes beaux yeux. Si vous voulez me parler, l’Archiduc ira peut-être voltiger, mais le temps est si court que je crois que nous attendrons à ce soir s’il y a opéra. Adieu, je vous baise, je baise la Vasquez et je prie la Vasquez de vous baiser."


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explication de texte de Marie-Jo Bonnet (excusez du peu !)> Cairn

L'avis FFF:

Voilà 3 ans déjà que ces extraits tentent de vous inviter à en lire davantage (la première parution sur Foleffet date de novembre 2010).
Trois ans après c’est aussi une manière d’envoyer un message à FdB !