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PETITE CHRONIQUE DES COURTISANES

vendredi 24 août 2012, par Sophie

Eté 2008- été 2012. Grisélidis Réal n’est plus de ce monde mais on peut toujours la lire.


GRISÉLIDIS RÉAL dans "CARNET DE BAL D’UNE COURTISANE". Edition Verticales.

"Les voilà toutes deux, Carla et son double, l’une blonde, l’autre rousse, parées pour le départ, faisant des mines et tournoyant comme des frégates qui appareillent.
J’imagine leur retour à la niche conjugale, leur chute sur des lits bas à coussins de fourrure. Quotidien, minutieux, le lent dépouillement commence. Tombent les perruques, les souliers cambrés d’où s’échappent enfin des pieds d’hommes meurtris, aux chevilles carrées douloureuses.
Elles se font des mignardises, dégrafent les jupes, les ceintures, détachent les soutiens-gorges, roulent précautionneusement les bas le long des rudes mollets épilés. Les bracelets, les bagues, les pendants d’oreilles fabuleux vont rejoindre sur la coiffeuse tout l’arsenal des fards, des flacons et des brosses, parmi les cendriers pleins de Kleenex souillés.
Les faux-cils tombent comme des touffes d’herbe noire sur la neige du lavabo. La poudre couleur chair, le bronze crémeux du fond de teint cèdent à l’onction des cotons humides.
Le plâtras fatigué, blafard, auc creux ombrés de barbe, de la peau de trés vieux garçons apparaît. Sur les torses las, les seins trop durs, nourris de silicone, se mettent au repos. Sous le slip de dentelle se lovent d’étranges racines charnues...
Ils s’embrassent peut-être, après une dernière cigarette, un dernier verre de whisky, et s’abandonnent au sommeil, comme deux frères jumeaux enlacés l’un à l’autre, bercés par de vieux rêves chatoyants et maternels."


GRISELIDIS PAR SES AMIS > aspasie

GRISELIDIS en live > RTS

FICHE AUTEUR > editions verticale

UNE INTERVIEW > Centre Grisélidis Réal

SEXREPORTERS > là-bas

L'avis FFF:

A mettre en relation avec et écouter "Dans la rue", sur le site de France Culture Un documentaire de Kaye Mortley (production et réalisation) : "Par moments, dans la rue, le ton monte, les voix se font fortes. Il se passe donc quelque chose ? On s’approche de la fenêtre pour voir, pour écouter. On découvre, alors, que la rue s’est transformée en scène, dont le- petit- décor- sonore- qui- suinte- par- la- fenêtre- ouverte- en- été est la toile de fond invisible. Ou la bande son éphémère, mixée en direct. Scène sur laquelle se joue une comédie (d’erreurs ?) faite d’attentes et de rencontres d’apparitions et de disparitions de recommencements de l’attente. Scène sur laquelle chaque rôle est soigneusement distribué chaque place tacitement, implacablement attribuée chaque costume un déguisement outrancier, jouissif, désespéré et le nom de chaque personnage faux. Un jour on décidera (peut-être) d’aller parler à ces comédiens del’ arte. (C’est ainsi que commencent beaucoup de documentaires.) Leur demander d’expliquer la régie qui gouverne leur théâtre de rue si ritualisé. Et qui est l’auteur du scénario. Les travaux d’approche seront longs (après tout, l’illégalité rend prudent). Les séances d’enregistrements seront courtes (vingt minutes c’est le temps d’une passe). Le récit de vie qui se tisse de séance en séance n’est ni vrai, ni faux...C’est une sorte de fiction. Comme tous les récits de vie. M., travesti, originaire d’une famille pauvre en Algérie, travaille dans la rue depuis plus de trente ans."