Ah ! Voilà que la pièce de CLAUDE LEVEQUE fait débat. Ouf ! On commençait justement à étouffer dans le milieu de l’art français. Manquait un petit, mais alors, tout petit débat. Et vous qu’en pensez-vous ?
La vidéo de la pièce de Claude Leveque sur les INROCKS
VERSUS ARTNET
où Claude explique le projet du pavillon français de la Biennale de Venise.
"Vous arrivez devant le Pavillon français. Un air de catafalque. Derrière le péristyle se dresse une paroi noire, aveugle, muette, inaccueillante. La façade concave est aussi peinte en noir. (…) Déplacements limités, sensations contraintes, le regard doit se couler entre les barreaux. Ici la lumière est intense, les murs nacrés la refroidissent et la diffractent. Là c’est la pénombre, l’obscurité où se froissent des reflets. Jour, nuit. Maintenant, là-bas. Ces drapeaux noirs qui frémissent au loin lèvent-ils l’image d’un espoir radical, d’un altermonde possible ? Où part ce bateau qui passe parmi nous ? Sommes-nous les fantômes d’un futur antérieur ? Le « Grand Soir » a-t-il eu lieu demain ? L’essentiel de l’œuvre de Claude Lévêque consiste en installations qui articulent objets, sons et lumières et s’emparent puissamment des lieux et des spectateurs. Il développe ainsi, depuis le début des années quatre-vingt, un univers du saisissement, à mi-chemin entre coercition et ravissement. Mémoire traumatisée ou nostalgique des émerveillements de l’enfance, ambivalence des signes et des affects, rage du désir, révolte devant la difficulté d’être et la violence du monde, l’univers de Lévêque trouve son matériau et focalise son objet dans la destruction. L’inconfort ou l’inquiétude existentielles qui sourdent de ses mises en scène, l’ambiguïté des sentiments que suscitent ses dispositifs emblématisent les formes contemporaines du contrôle social et de l’oppression — servitude volontaire ou non. « Nous voulons en finir avec ce monde irréel » proclame un néon de l’artiste, dans une écriture manuscrite dont les lettres tremblées, fiévreuses, figurent la condition dominée et/ou rebelle. Il s’agit d’une phrase de Florence Rey, fascinante icône française de la violence nihiliste. Cet énoncé radical donne le ton de l’œuvre souvent théâtrale, spectaculaire, impressionnante de Lévêque. Elle n’use pourtant que de la dissymétrique force des faibles. Art total et art pauvre, art du réel dans sa cruauté et art du rêve dans ses inquiétants labyrinthes, art de l’égarement, entre panique et merveilleux. Ainsi de l’installation Le Grand Soir. Son titre est un leitmotiv du discours révolutionnaire : grand soir du « vieux monde », des « anciens régimes ». La chouette de la liberté ne s’envole — si elle s’envole — qu’à la nuit tombée."
Texte de Christian Bernard pour le catalogue général de la Biennale de Venise
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