Hier on venait tout juste d’arriver à Skala Eressos, la capitale lesbienne de l’ile de Lesvos. Plein d’endroits ici s’appellent Sappho quelque chose. Sappho Hotel, Sappho Travel, etc.. Au debout c’est drôle, puis ça devient un peu inquiétant.
Mais qui etait Sappho ? Il est bien difficile de parler de la vie de Sappho car nous ne savons que très peu de choses. Elle serait née vers 612 a.C. à Eressos, dans une famille aristocratique puis elle aurait déménage rapidement à Mytilene. Elle aurait également, pour une raison inconnue, été exilé à la fin de l’adolescence sur une autre ile, va savoir... En tout cas, lors de cet exile elle se serait marié, eu un enfant, puis, veuve de son mari richissime, elle serait revenue à Lesvos vers ses 25 ans pour créer son groupe d’adeptes des muses (c’est pour cela que Platon l’appelait la dixième muse). Une sorte de club de filles ou on discute, on fait de la musique, de la philosophie et de la politique et plus si affinités. Un truc bien quoi, entre l’association féministe, le bar lesbien et boite de prod queer. Kill the dj n’aurait donc pas totalement inventé le concept.
Sappho était probablement une femme fascinante et très intelligente. Elle aurait écrit beaucoup de poèmes, dont la plupart on été détruits par un Pape fervent inquisiteur. Malgré cet acharnement contre son œuvre jugé immorale, elle a été sans doute la première femme rock-star planétaire. Un peu comme Madonna, sa notoriété était énorme all over the world et à travers les époques. Les égyptiens se faisaient inhumer avec les poèmes de Sappho enroulés au corps, que par la suite devenait momie. Même si certains disent qu’elle se suicida par amour d’un mec, il (me) paraît plus crédible de suivre l’interprétation de Claude Cahun que dans son livre « Héroïnes » raconte sa version, la plus drôle, de la fin de Sappho : elle se serait effectivement hissée sur un rochet et fait semblant de se getter à la mer. En réalité, caché derrière ledit rochet, elle serait rentrée chez elle et aurait vécu (enfin) tranquille jusqu’à sa mort à Lesvos entourée par ses copines. Pas bête.
Ceci pour la parenthèse historique. En tout cas, notre première soirée a Skala Eressos, nous l’avons passée à la 10th Muse, un des bars lesbiens, le plus ancien je crois, parce que cette année elles fêtent leur 15 ans d’existence. Respect de la part de FFF !
Le deuxième jour c’est celui de l’expédition plage. On nous a bien dit qu’il y aurait une plage lesbienne nudiste. Nous on est prêtes. On part le matin avec plein de doutes : comment va-t-on reconnaître cet espace révolutionnaire ? Rien de plus simple. Malgré le fait que la plage d’Eressos est longue de 4km, le carré lesbien est assez visible. Un filet de volley avec drapeau arc-en-ciel, des filles qui campent, des matelas gonflables matrimoniaux flottent sur l’eau avec à bord des couples lesbiennes nues. On y est ! Et on y restera.
L’après midi une fille qui distribue des flyers nous approche : elle nous explique que le soir c’est la Croisière Women Only puis un concert au Sappho Garden, la discothèque lesbienne. Ma girlfriend veut évidemment faire les deux.
Puis les jours s’enchainent. On regarde tous les matins par la fenêtre. Le soleil brille sans faille. On répète alors la blague de nos copines de Los Angeles : « another fucking sunny day ». Je reçois des messages des FFF : à Paris il pleut. « Vie dure » on se dit le soir en rentrant de la plage, après avoir donnée rdv a nous nouvelles copines, Else, l’hollandaise qui vient à Eressos depuis 15 ans, Sylke et Betty, les allemandes qui font du sport, Isabelle la française qui connait tous les secrets de la vie sous-marine lesvenne, etc...
Un soir en rentrant, on croise une anglaise qu’on ne connait pas mais qui apostrophe ma girlfriend : « Salut toi, je ne t’avais pas reconnue habillé ». Je rigole moyen.
Une seule fois on voyage dans l’ile pour aller découvrir le très beau village de Sigri, juste à coté. Mais malgré la beauté de la petite crique caché, notre plage d’Eressos nous manque et on veut vite revenir chez nous.
Je ne vais pas vous révéler ici tous les détails de la vie à Lesvos parce que ça gâcherait la surprise quand enfin vous aussi vous aurez l’occasion d’y aller faire un tour.
Juste un dernier truc. Avant de partir, ma copine Mariella m’avait raconté le mythe définitif de Skala Eressos. Elle m’a dit qu’une année d’il y a longtemps, alors qu’elle y passait ses vacances, un beau jour du mois d’aout, un grand bateau de croisière avait jeté l’ancre dans la baie. Elle m’a dit que pendant que avec ses copines elles bronzent nues sur la plage, de ce grand bateau étaient descendues une quantité incongrue de femmes. Des canots avaient en effet débarqué sur la plage et en quelque minutes Mariella et ses copines s’étaient retrouvées entourées par un épais troupeau de baleines, c’est à dire des américaines de grande taille (par rapport à Mari qui fait 1m60 à peine). C’était la Olivia Cruise, la croisière 100% lesbienne. J’ai passé toutes les vacances à l’attendre, en vain. C’est surement à cause de la crise.